Les pratiques d'articulation travail-famille au sein de la Gestion des Ressources Humaines ne sont pas une nouvelle pratique. En effet, les pratiques paternalistes sont un exemple bien connu. L'exemple de l'entreprise Bata illustre le concept de paternalisme poussé à l’extrême : "les salariés Bata se voient ainsi proposés des hébergements et des loisirs de qualité, des produits de consommation à bas prix sans parler des salaires plus élevés qu’ailleurs. Tout est donc fait pour que les salariés trouvent tout ce dont ils ont besoin sur place et n’aient pas à quitter Bataville."[…] " Toute une infrastructure sociale paternaliste se développe avec la création de nombreuses associations ou clubs sportifs, des équipements collectifs […]."
Pourquoi actuellement les entreprises en France ont un rôle assez limité concernant les politiques d'articulation travail-famille ?
Selon Ariane OLLIER-MALATERRE, les différences de régime d'Etat-providence, les congés payés, les congés parentaux, la semaine de 35 heures n'expliquent pas tout. Les acteurs impliqués dans ces projets sont différents selon les pays. Aux Etats-Unis et au Royaume Uni, la DRH est sollicitée alors qu'en France, le CE, le CHSCT, la Médecine du Travail sont aussi impliqués dans les programmes d'articulation vie professionnelle – vie familiale. D'après Ariane OLLIER MALATERRE, après avoir mené une étude en France avec 44 personnes de profil différent (DRH, partenaires sociaux, salariés et prestataires de service), elle a pu dégager 5 facteurs qui expliquent la moindre adoption de pratiques en France :
-
La moindre légitimité des employeurs dans la sphère privée, par rapport à l'Etat providence. Les salariés français font appel aux services publics et la loi plus que vers leur employeur. Les employeurs ont une attitude prudente par rapport à ces questions car ils ne veulent pas être accusés d'être trop intrusif ou paternaliste.
-
Le climat social inhibant notamment la faible tradition de négociation collective, les freins structurels au dialogue social et un relatif désintérêt des syndicats français pour cet enjeu, qui leur paraît plus anecdotique que, par exemple, la négociation du salaire ou du temps de travail,
-
Le cadre législatif lourd (la gestion des congés et des 35 heures) qui prennent du temps et de l'énergie des Responsables de Ressources Humaines.
-
Le manque d'expertise des Ressources Humaines en interne comme en externe car il y a très peu de recherches et de prestataires spécialisés.
-
La faible contribution perçue des pratiques à la stratégie et à l'image de l'entreprise. Les dirigeants et les DRH en font une interprétation plus sociale qu'économique : il s'agit de bénéfices sociaux, d'égalité professionnelle hommes-femmes, de Responsabilité Sociale des Entreprises et non de compétitivité.
D'après les résultats d'A. OLLIER MALATERRE concernant l'attitude des entreprises françaises face aux problématiques d'articulation vie professionnelle – vie familiale, ces pratiques pourront se développer plus dans les entreprises si la contribution économique est démontrée et notamment :
-
si l'entreprise est dans une guerre des talents (question stratégique)
-
si la structure est une grande entreprise exposée à l'international et donc sensible à l'image et s'adressent plutôt aux cadres et aux salariés qualifiés.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Quel est votre retour d’expérience sur ce sujet ?
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Source de l’image : Robbert van der Steeg / Flickr