Une enquête originale[1] concernant les pères managers a été réalisée par le Cabinet de conseil Equilibres[2] dans le cadre du projet européen Qualitemps et du nouveau volet d'actions lancé par la Commission Européenne pour favoriser l'équilibre de vie et l'égalité entre les hommes et les femmes.
Le choix de l'échantillon s'est porté sur les pères à hauts potentiels dans les grandes entreprises françaises. Equilibres a fait ce choix car ce sont eux qui sont "porteurs de la nouvelle culture managériale". Et qui pourront influer sur les comportements en entreprise concernant l'articulation vie professionnelle – vie familiale.
Deux enquêtes ont été réalisées :
- une enquête qualitative auprès de 60 jeunes pères (30 à 40 ans) cadres supérieurs et hauts potentiels au sein de 5 entreprises : Suez, PSA, Saint Gobain, Coca Cola Entreprise et Bain & Company, de mai à novembre 2007,
- une enquête quantitative réalisée par LH2 entre le 1er octobre et le 12 octobre 2007 auprès de 400 pères cadres de moins de 40 ans.
Une vingtaine de DRH de grandes entreprises ont été également interviewés pour compléter le point de vue.
L'enquête a pu révéler trois profils des pères interrogés :
1) Les pourvoyeurs de revenus (15 % de l'échantillon quantitatif et 4 pères sur 10 de l'échantillon qualitatif)
La carrière professionnelle est très importante pour cette catégorie de pères. Ils passent beaucoup de temps au travail et prennent très peu en charge les tâches domestiques. Les pourvoyeurs de revenus sont les moins satisfaits en ce qui concerne l'articulation vie professionnelle – vie familiale
2) Les équilibristes (52 % de l'échantillon quantitatif et 2 pères sur 10 de l'échantillon qualitatif)
Ce groupe de pères managers est en quête d'une meilleure articulation entre leurs différents temps de vie. Ils sont relativement égalitaires dans la manière d'appréhender les rôles féminins et masculins. Même s'ils doivent se montrer souples, pragmatiques et imaginatifs pour trouver des solutions au quotidien, ils sont plus satisfaits que les pourvoyeurs de revenus.
Les attentes de cette catégorie sont une évolution culturelle de l'entreprise vis-à-vis de ce sujet et la mise en place de mesures visant à mieux articuler les temps de vie notamment la flexibilité horaire et la mise en place de services dédiés aux salariés-parents.
3) Les égalitaires (33 % de l'échantillon quantitatif et 4 pères sur 10 de l'échantillon qualitatif)
Ce troisième groupe de pères managers est sensible à la problématique de l'articulation des temps de vie. Ces pères managers ont une vision égalitaire des rôles de la femme et de l'homme que ce soit dans la sphère professionnelle ou celle domestique.
Ils souhaitent vivement un aménagement plus radical de la norme et notamment une révision de l'organisation du travail (temps de travail). Ils ne construisent pas leur identité uniquement par le biais du travail.
Ces enquêtes illustrent un changement perceptible au niveau des perceptions des temps de vie chez les cadres.
Les freins à l'articulation vie professionnelle et vie familiale perçus par les pères cadres sont les suivants :
- les stéréotypes de genre enfermant dans une identité obsolète,
- la culture de l'implication totale
- les congés parentaux, temps partiel et respirations professionnelles encore tabous.
- Un sujet peu abordé avec sa hiérarchie
Ainsi, l'articulation au masculin dans les entreprises demandera encore du temps. Comme le précise Bénédicte Bertin-Mourot, sociologue, "appliquer une politique de parentalité revient à bousculer l'organisation du travail et la culture managériale de l'entreprise. Ce qui demandera beaucoup de temps. Elle doit surtout venir du haut, être portée par le management : le patron d'une entité ou d'une entreprise."[3]
[1] Cabinet Equilibres (2008), "Les pères managers en quête d’équilibre", Projet Qualitemps/FSE/CNIDFF
[2] Cabinet de conseil spécialisé sur le sujet de la conciliation des temps de travail et des temps personnels. Equilibres a participé avec HR Valley, SOS Préma et l'Oréal à la rédaction de la Charte de la Parentalité, qui a vu le jour le 11 avril 2008.
[3] Article "Plus loin avec Bénédicte Bertin-Mourot, La parentalité doit être portée par le management", Entreprises & Carrières, N°929/930 – du 4 au 17 novembre 2008