J’ai lu avec beaucoup d’intérêt l’étude réalisée par Sandra Laquelle, responsable projet à la DGAFP (Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique) sur la thématique « Pour une meilleure articulation entre vie professionnelle et vie familiale - Identification des bonnes pratiques des secteurs public et privé en France et à l’étranger », parue en janvier 2013.
J’ai voulu en savoir plus et je remercie chaleureusement Sandra Laquelle d’avoir accepté d’échanger sur cette étude.
Sandra, pourriez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours professionnel ?
Après une première expérience au sein de l’équipe Secteur public d’un cabinet de conseil, j’ai rejoint en 2010, le ministère des Finances, où j’ai travaillé pendant deux ans comme chargée de mission, avant d’intégrer en 2012 le ministère de la Réforme de l’Etat, de la décentralisation et de la fonction publique. Je suis aujourd’hui Responsable de projets à la Direction générale de l’administration et de la Fonction publique (DGAFP), large « DRH » groupe qui a en charge l’animation et le pilotage des politiques RH pour les 5,2 millions d’agents publics.
Parmi les missions que j’effectue, je contribue notamment à la détection de pratiques innovantes des administrations publiques en France et à l’étranger en matière de gestion RH et à l’identification de bonnes pratiques dans ce domaine dans les secteurs publics et privé.
Vous avez rédigé l’étude « Pour une meilleure articulation entre vie professionnelle et vie familiale - Identification des bonnes pratiques des secteurs public et privé en France et à l’étranger ». Pourquoi avoir choisi cette thématique ?
Il parait pertinent de resituer le contexte dans lequel s’inscrit la parution de l’étude. Présentée le 4 septembre 2012 par le Gouvernement à l’issue de la grande conférence sociale, l’Agenda social comporte un axe fort en faveur de l’égalité professionnelle entre hommes et femmes.
Dans le cadre des réunions de concertation et de négociation qui ont suivi [et qui ont donné lieu à la signature d’un protocole d’accord le 8 mars 2013], les équipes de la DGAFP ont souhaité connaitre les modèles appliqués à l’international en matière d’égalité professionnelle, et s’inspirer des bonnes pratiques et des mesures innovantes dans ce domaine. J’ai ainsi contribué à analyser ces éléments et ainsi accumulé beaucoup de « matière », qu’il nous a paru intéressant de restituer et de partager par le biais d’une étude publiée par la DGAFP. Le thème de l’égalité professionnelle étant très large, nous avons ensuite choisi de cibler la question de la conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle, pour les parents et les aidants familiaux.
Pouvez-vous nous présenter en quelques lignes le contenu de cette étude ?
L’étude présente un ensemble de bonnes pratiques relatives à l’articulation des temps de vie, en France et à l’étranger (secteurs public et privé). Ces pratiques sont articulées autour de trois axes forts d’amélioration :
- la gestion de l’interruption de carrières, autrement dit la prise de congés familiaux (au sens large). Incontournable pour les femmes, parfois redouté par les hommes, la prise de congé pour les parents (congé de maternité, de paternité ou congé parental) constitue une période délicate et une rupture potentielle dans la trajectoire professionnelle. L’étude montre ainsi plusieurs exemples de mesures mises en œuvre par des employeurs publics ou privés pour favoriser la prise de ces congés (par exemple le congé parental fractionnable en Belgique). Certains dispositifs visent également à maintenir le lien entre le salarié et l’employeur, notamment par le biais d’entretiens professionnels, comme en Allemagne ou au sein d’entreprises telles que HSBC et CapGemini.
- La promotion du père dans les responsabilités familiales. Dans une étude publiée en 2009 au Royaume-Uni par la Commission pour l’Egalité et les Droits de l’homme, deux hommes sur trois indiquaient qu’ils craignaient de formuler une demande d’organisation de travail plus flexible… de crainte d’être stigmatisés ! L’étude présente le cas d’organisations publiques à l’étranger qui ont tenté de faire évoluer, parfois avec humour, les schémas culturels qui perdurent, et qui contribuent à un déséquilibre très important des tâches familiales entre hommes et femmes.
- L’aménagement du temps et des conditions de travail des salariés. Les employeurs publics et privés ont su aller plus loin que le système de temps partiel et proposer des mesures assez innovantes en matière d’aménagement du travail, en s’appuyant notamment sur les opportunités offertes par les technologies de l’information et de la communication (TIC). Le secteur public n’a d’ailleurs rien à envier sur ce point aux acteurs privés, comme en témoigne le développement et l’encadrement du télétravail dans l’administration en Belgique et aux Etats-Unis.
D’après vous, quels sont les grands enseignements de cette étude ?
Les bonnes pratiques identifiées portent sur la dernière décennie, pendant laquelle on observe une forte accélération de la prise en compte des enjeux d’égalité professionnelle entre hommes et femmes. Même s’il est difficile de comparer les pratiques d’un pays à l’autre en raison des spécificités propres à chaque administration ou entreprise, il est intéressant de noter que le « focus » mis sur la conciliation des temps de vie a donné lieu à des mesures similaires dans les différents pays (utilisation des nouvelles technologies, diffusion d’information relatives aux droits des salariés, assouplissement du temps de travail etc.). Dans tous les cas, ces mesures sont l’aboutissement d’une double contrainte : favoriser l’épanouissement familial des salariés tout en intégrant les contraintes des employeurs.
Un autre point à noter est l’absence d’indicateurs ou de données (ou du moins leur non-diffusion) permettant d’assurer le suivi et l’évaluation des mesures mises en œuvre. Rares sont les informations permettant d’évaluer l’impact effectif des pratiques mises en avant par les acteurs publics ou privés sur l’amélioration de la gestion des temps de vie pour leurs salariés ou agents.
Je vous remercie Sandra pour cette interview.
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